(contenu partenaire) Quelle que soit sa taille et son activité, une entreprise ne peut plus trouver de faux prétextes pour différer l’élaboration de sa politique biodiversité.
On parle souvent des COP sur le changement climatique, mais il existe également des COP sur la biodiversité. Ainsi la dernière COP15 sur la diversité biologique, tenue en décembre 2022 à Montréal sous présidence chinoise. Bien moins médiatisée que les COP climat, elle s’en est distinguée sur au moins deux points majeurs.
Le premier est que le contenu de l’accord qui en est issu, fixant le cadre des politiques des Etats à l’horizons 2030, a dépassé les prévisions les plus optimistes : conserver le tiers des terres et des océans, restaurer le tiers des écosystèmes dégradés, réduire de 500 milliards de dollars par an les subventions néfastes à la biodiversité, …
Le second, insuffisamment souligné, est que le rôle des entreprises y a été unanimement reconnu comme déterminant dans l’accélération de la lutte contre l’érosion de la biodiversité. Non seulement par la réduction de la pression de leurs activités sur le vivant, mais aussi par les solutions qu’elles pourront apporter grâce à leur capacité d’innovation, de mobilisation de leurs chaînes de valeur, de déploiement à grande échelle. Et c’est cet esprit que l’on retrouve dans la nouvelle Stratégie nationale française pour la biodiversité, publiée en décembre dernier.
Cette responsabilité des entreprises pour le bien commun s’accompagne de la nécessité d’une réflexion sur la dépendance de leurs activités aux services rendus par les écosystèmes. Le Forum Mondial de Davos rappelle régulièrement que la perte de biodiversité égale quasiment le changement climatique dans le classement des risques qui menacent l’économie mondiale. Et quelle entreprise peut être en mesure d’assurer qu’aucune de ses activités, ou de celles de ses fournisseurs, ne dépend pas des services écosystémiques qui assurent la préservation de la qualité de l’eau ou des sols, la lutte contre l’érosion, la pollinisation des plantes, la production des matières premières issues du vivant … ? La nouvelle directive européenne sur le reporting extra financier, la CSRD, qui fait de la biodiversité un sujet à part entière, doit ainsi clairement être considérée comme une opportunité de s’interroger sur la matérialité de ce sujet et non comme une obligation supplémentaire de publication de données.
En deux mots, de la même manière qu’au regard du changement climatique, aucune entreprise, quelle que soit sa taille et son activité, ne peut éviter de se doter d’une politique liée à la nature et à la biodiversité.
Faisons la chasse à quelques idées reçues qui sont souvent un bon prétexte pour ne pas se lancer :
- La biodiversité est un sujet forcément local, lié aux sites d’exploitation, et qui doit être traité au plan local ? Les émissions de gaz à effet de serre aussi, et elles font bien l’objet de politiques corporate.
- On ne dispose pas d’indicateur intégré, comme le CO2 équivalent, pour mesurer son impact – ou sa contribution positive – à la biodiversité en général ? Peut-être, mais cela n’est pas le cas quand il s’agit de les mesurer au regard des principales pressions sur la biodiversité identifiées par l’IPBES, pour lesquelles les entreprises disposent en général déjà de batteries d’indicateurs : changement climatique, pollutions air/eau/sols, consommation d’eau et de ressources naturelles, imperméabilisation et changement d’usage des sols …
- On ne sait pas par quoi commencer ? Sans aucun doute par ses propres activités avant de s’attaquer à sa chaîne de valeur, avec quelques sites pilotes qui seront situés dans des zones à fort potentiel en matière de biodiversité – des cartes sont disponibles en accès libre sur internet – et /ou dont les activités présentent le lien le plus fort à la nature en matière d’impacts ou de dépendances.
- Comment structurer sa politique biodiversité ? Autour des mêmes piliers que pour les politiques climat : matérialité des enjeux, évaluation des risques et opportunités, objectifs et métriques, intégration dans la gouvernance.
Acceptons enfin qu’un engagement dans la protection de la biodiversité peut avoir un caractère frustrant : d’abord car il s’applique en général à la biodiversité ordinaire telle que le lombric, l’insecte, voire la bactérie …- et non à la biodiversité remarquable – les grands mammifères -, qui est en haut de la pyramide. Ensuite, car il ne peut souvent faire part de résultats de terrain tangibles que sur le temps long – sur un site il s’écoule en général 4 à 5 ans entre deux inventaires écologiques. Enfin, car le vivant est par nature complexe et que l’on n’est donc jamais certain de l’effectivité des mesures adoptées.
2. Intergovernmental Science-Policy Platform on Biodiversity and Ecosystem Services – “Le GIEC de la biodiversité”
3. La TNFD (Task Force for Nature related Financial Disclosure), publiée en septembre 2023 à l’initiative de représentants des secteurs financiers et industriels, propose un cadre d’action et une grammaire commune à l’ensemble de ces acteurs ordonnée autour de ces piliers.