Quel bilan tirez-vous de cette édition des Universités du Tourisme Durable ? Quels temps forts ont émergé, et comment ces moments reflètent les avancées ou les freins actuels du secteur ?
L’association Acteurs du Tourisme Durable (ATD) vient de clôturer la 11ᵉ édition des Universités du Tourisme Durable (UTD), qui a réuni près de 600 professionnels sur deux jours pour échanger, partager et s’inspirer autour de plus de 50 intervenants.
La première journée, le 9 octobre, a été marquée par la conférence inspirante de Tarik Chekchak, grand témoin de cette édition, et par une série d’ateliers, de tables rondes et de rencontres avec les porteurs de solutions, autour d’un fil rouge : intégrer le vivant au cœur des modèles touristiques.
La matinée a également accueilli une carte blanche laissée à 100 étudiants en tourisme, venus de toute la France, et regroupés pour la première fois par INNTO France. Ils ont interpellé les professionnels sur leur prise en compte des enjeux de transition et ont généré beaucoup d’émotion dans l’auditoire.
Le lendemain, cinq éductours ont sillonné le territoire angevin et permis aux participants de découvrir des initiatives locales exemplaires
Cette édition illustre le dynamisme d’un réseau interprofessionnel qui mobilise toute la chaîne des métiers du tourisme — des institutions aux hébergeurs, des agences aux sites de loisirs, des formateurs aux porteurs de solutions. Elle témoigne d’un engagement collectif et croissant, porté par des acteurs déjà engagés dans une démarche de progrès et par de nouveaux professionnels désireux de se former et d’agir. Tous viennent y puiser inspiration, outils et coopération pour accélérer ensemble la transition durable du tourisme
Au-delà des discours, où en est concrètement le tourisme durable en France ? L’association plaide pour dépasser les logiques purement économiques (visant 100 milliards de chiffre d’affaires) pour privilégier une stratégie de « mieux » plutôt que de « plus ». En quoi ce virage est-il réaliste et urgent ?
Nous constatons une prise de conscience réelle de la part des professionnels et des aspirations à évoluer de la part des visiteurs, mais la transition ne constitue globalement pas encore une priorité. ATD dénonce les logiques purement économiques, qui visent uniquement la croissance des arrivées et dépenses étrangères, laissant ainsi de côté les questions liées au tourisme domestique qui constitue pourtant un levier de transition. ATD œuvre pour privilégier une stratégie de valorisation des bonnes pratiques, de production d’outils pour aider les pros à faire les bons choix ; une stratégie qui prône de la progressivité, de la nuance, de la réflexion.
Il est urgent : face aux enjeux climatiques, à l’érosion de la biodiversité et aux attentes croissantes des voyageurs, que les professionnels et institutionnels agissent main dans la main et que le tourisme durable ne soit pas (plus ?) considéré comme une gamme ou un marché mais comme une direction à prendre collectivement.
Quels signaux forts remontent des territoires après cet événement ? Au niveau local, quelles initiatives ou expérimentations vous inspirent, et comment peuvent-elles être dupliquées à l’échelle nationale ?
Les initiatives locales se multiplient pour mieux intégrer les habitants dans les stratégies ou encore faire évoluer la gouvernance du tourisme local comme à Strasbourg Elles construisent, par exemple en Normandie, une offre bas carbone qui privilégie les visiteurs qui choisissent les mobilités douces ; elles réinventent les Offices du tourisme pour en faire des tiers-lieux de rencontre, d’accueil, d’échange entre professionnels, habitants et visiteurs… C’est le terme de coopération qui me semble émerger: entre territoires, avec les habitants, avec les entreprises porteuses de solutions…
Une autre notion me semble avoir été beaucoup entendue : la baisse des moyens financiers alloués aux Organismes de Gestion des Destinations pour mener à bien ces missions de sensibilisation, de structuration, de formation. Il nous apparaît indispensable de reconstituer des lignes de financement pour les territoires et les professionnels afin d’accompagner cette transition.
Les labellisations Green Destinations soutenues par le CRTL d’Occitanie montrent que la démarche durable peut être structurante et valorisante pour un territoire où les solutions innovantes, comme O-Cell, accompagnent déjà les professionnels. Ces exemples inspirants démontrent qu’il est possible de dupliquer les bonnes pratiques à l’échelle nationale, à condition de combiner accompagnement, ressources et coopération interprofessionnelle.
Comment ATD compte-t-elle accélérer l’influence de l’événement dans les décisions politiques et économiques ? Alors que l’association appelle à instaurer une « cohérence nationale » et dépasser le millefeuille institutionnel, quelles prochaines étapes ou alliances envisagez-vous ?
Les UTD sont au cœur de la stratégie d’influence du secteur sur les décisions politiques et économiques. ATD a rappelé l’urgence à agir et interpelle les décideurs pour que la transition durable reste la priorité nationale du secteur. Les UTD constituent une tribune majeure pour sensibiliser tous les acteurs, objectiver les enjeux et proposer des solutions concrètes.
En parallèle, ATD se positionne comme un réseau de plaidoyer au service de ses membres, pour porter haut et fort les intérêts de la transition du tourisme. Ainsi, l’association a publié une tribune pour une politique ambitieuse en faveur de la mobilité ferroviaire, illustrant sa volonté de relier enjeux environnementaux et choix stratégiques du secteur. ATD prévoit également de mobiliser les candidats aux élections municipales afin qu’ils intègrent les enjeux du tourisme durable dans leurs programmes.
Enfin, ATD multiplie les partenariats avec les acteurs majeurs, comme ADN Tourisme ou Atout France, pour accompagner la transformation de manière collective. L’objectif est de travailler main dans la main avec l’ensemble de l’écosystème pour faire du tourisme durable le seul cap de l’industrie.