TOP 50 des influenceurs RSE 2025 : les coulisses d’un classement data-driven
Méthodologie, grandes tendances et surprises du palmarès : le point complet avec Delphine Pachoud, Insights Consulting Manager chez Cision.
Comment mesurer l’influence responsable à l’ère de LinkedIn ? Quels critères retenir pour classer les voix qui comptent dans la transition ?
Dans cet entretien exclusif, Delphine Pachoud détaille pour The Good les coulisses méthodologiques du classement The Good x Cision 2025. Elle en dévoile aussi les enseignements majeurs : montée en puissance des dirigeants à impact, écrasante domination des sujets environnementaux, et visibilité encore trop discrète des enjeux sociaux et de la diversité.
The Good : Quelle est la méthodologie de ce classement des influenceurs de la RSE The Good x Cision 2025 ?
Delphine Pachoud : Pour réaliser ce Top Influenceurs 2025, l’équipe Cision Insights a suivi une méthodologie en 3 étapes : 1ère étape : la constitution du corpus
Nous avons travaillé à partir de la base de données déjà très riche constituée par les rédacteurs de The Good, qui recensait plus de 200 personnalités influentes dans le champ de la RSE. Les analystes Cision Insights ont complété cette liste en identifiant d’autres parties-prenantes récemment mises en lumière, notamment lors d’événements comme ChangeNow, Palmarès Giverny, UNIQUES ou 50 partners impact. Au total, près de 300 influenceurs potentiels ont été observés pour établir ce classement (nous avons fait le choix d’écarter les politiques et les activistes).
2ème étape : la récolte des données
Les analyses Cision Insights ont collecté le nombre d’abonnés LinkedIn de chaque personnalité afin d’isoler les 50 influenceurs les plus suivis. Ces 50 comptes ont ensuite fait l’objet d’une analyse plus qualitative sur les 3 derniers mois : quels sujets ont-ils abordé sur LinkedIn ? Quelle a été leur activité (nombre de posts) ? Puis nous avons extrait les principaux KPI’s sur leurs 3 derniers posts : nombre de j’aime, commentaires et republications. Cela nous a permis de calculer un taux d’engagement afin d’évaluer leur résonnance auprès de leur audience.
3ème étape : le classement final
Chaque personnalité a reçu un score global basé sur 3 critères : le nombre d’abonnés, le taux d’engagement et le nombre de posts. L’audience et l’engagement ont été pondérés à égalité car ils reflètent tous deux des dimensions essentielles de l’influence. Le volume de publications témoigne de la dynamique de prise de parole, c’est important mais secondaire dans la mesure de l’influence : l’activité a donc été prise en compte avec une pondération divisée par deux.
The Good : Quels sont les grands enseignements de ce Top 50 cette année ?
Delphine Pachoud : Mon 1er constat avant d’entrer dans le détail : le nombre d’abonnés LinkedIn de notre Top 50 a évolué de +19% en moyenne depuis l’année dernière (pour ceux qui étaient déjà dans le corpus 2024). Cela illustre bien l’intérêt grandissant des professionnels en matière de RSE. Trois influenceurs se distinguent particulièrement sur le taux d’évolution de leur communauté : +79% pour Salomé Saqué (« Journaliste, autrice de « Sois jeune et tais-toi » chez Payot »), +62% pourTimothée Parrique(« Chercheur en économie écologique, spécialiste de la décroissance et du post-capitalisme ») et +60% pour Gabriel Malek(« Président Alter Kapitae – auteur « les Sensei de la Décroissance » – CF Amis de la Terre – CA Institut Rousseau – CA Opération Milliard »).
Intéressons-nous maintenant au podium final. En termes de nombre d’abonnés pur, c’est Jean-Marc Jancovici(« Associé Carbone 4 – Président The Shift Project ») qui arrive très largement en tête avec une audience monumentale d’1,2 million d’abonnés LinkedIn. A titre de comparaison, Yann Arthus-Bertrand est le 2ème en audience avec « seulement » 346 763 abonnés. Jean-Marc Jancovici fait également partie des personnalités qui publient le plus souvent, avec en moyenne 1.2 post par jour sur ces 3 derniers mois. Son activité lui permet de fédérer et de développer son audience : il a gagné 9% d’abonnés vs 2024 (+ de 100K abonnés), ce qui est remarquable vu la taille de sa communauté (il est plus difficile de gagner des abonnés quand on a déjà une forte notoriété). Grace à sa large audience et à son activité régulière sur les sujets environnementaux, Jean-Marc Jancovici prend la 1ère place du podium de notre Top 50 Influenceurs RSE The Good x Cision 2025.
François Gemenneet Jean-Pierre Farandou arrivent respectivement à la 2ème et 3ème place de notre classement 2025, grâce à un taux d’engagement de 7% sur les posts analysés. Il s’agit des 2 plus fortes performances du panel (on considère qu’un taux d’engagement est excellent au-dessus de 5%).
Pour ce qui est du nombre de posts, c’est le communicant Frédéric Fougerat qui remporte la palme avec presque 2 posts par jour, ce qui lui permet d’atteindre la 12ème place de notre classement.
Au-delà de ces KPI’s, il nous a semblé intéressant d’observer les principaux sujets d’expression de notre Top 50 sur LinkedIn sur les 3 derniers mois. Les ¾ des influenceurs évoquent la RSE sous l’angle environnemental, qu’il s’agisse de changement climatique, de transition énergétique, d’écologie, etc. On note une affinité importante avec les sujets économiques qui sont mentionnés par 1 tiers des profils évoquant l’environnement.
La diversité/inclusion intéresse 28% de nos Top Influenceurs ; le bien-être au travail et la santé mentale ne sont évoqués que par 1 profil influent sur 6 (derrière les sujets IA/tech).
Autre angle d’analyse : les profils des influenceurs de notre Top 50. On constate que les dirigeant.e.s d’entreprises ou associations à impact comme Jean-Marc Jancovici (Carbone 4, The Shift Project), Gabriel Malek (Alter Kapitae) ou Arthur Auboeuf (Team for the Planet) représentent près de la moitié de notre classement, les sujets RSE sont donc naturellement au cœur de leurs posts [une entreprise ou une association a impact a pour objectif principal de répondre à un enjeu social ou environnemental et qui aligne ses ressources, son modèle économique, sa gouvernance et ses indicateurs de performance sur cette finalité]. Les dirigeant.e.s de grandes entreprises occupent 1/4 de notre Top 50, à l’instar de Jean-Pierre Farandou (SNCF), Estelle Brachlianoff (Veolia), Philippe Wahl (Groupe La Poste) ou Christel Heydemann (Orange). Leurs posts évoquant la RSE illustrent donc une réelle prise de position et un engagement personnel sur ces sujets.
The Good : Y a-t-il des surprises dans ce classement ? Lesquelles ?
Delphine Pachoud : Deux personnalités m’ont particulièrement marquée dans cette analyse :
Nous évoquions juste avant les dirigeant.e.s présents dans le Top 50 Influenceurs RSE The Good x Cision 2025. L’un d’eux fait figure d’exception tant son discours est concentré sur les sujets RSE. Il ne parle que de ça sur les 3 derniers mois et l’évoque dans tous ses aspects. C’est… Pascal Demurger, le Directeur Général du Groupe MAIF. Toutes ses prises de parole sont engagées, qu’il s’agisse d’engagement environnemental ou social. Même la publication des résultats financiers devient l’occasion de mettre en relation la performance et l’engagement. Il fait figure d’autorité dans les médias sur ces sujets et relaient régulièrement ses interviews dans la presse ou à la TV.
Autre personnalité singulière, Amélie Favre-Guittet se démarque par la qualité de ses posts : ses contenus sont développés, étayés, avec des chiffres et des exemples, elle utilise des photos, des vidéos, des images. Son ton parfois décalé et son style qui interpelle tranche avec les discours institutionnels classiques. Elle prend notamment position sur le bien-être au travail, la santé mentale, les jeunes générations, les séniors, la diversité/inclusion, les inégalités Hommes/Femmes au travail.
Tous deux sont engagés sur les angles sociaux et sociétaux, qui sont les grands absents de ce Top. Voilà mon 2ème point d’étonnement : les sujets diversité/inclusion ne sont évoqués que par 28% du Top 50 Influenceurs. Quant au bien-être au travail et à la santé mentale, ils ne représentent que 16% des sujets d’expression ! Dans l’étude que nous avons menée chez Cision sur la visibilité des sujets RSE dans les médias, nous faisons le même constat : ces sujets sociaux et sociétaux sont écrasés par les sujets environnementaux.
Si l’environnement est devenu une évidence pour beaucoup de marques en matière de stratégie et de communication, les marques et leurs ambassadeur·rice·s gagneraient à développer leurs actions et leur discours autour de la diversité/inclusion, de la santé mentale, du bien-être au travail, qui préoccupent l’opinion publique et tout particulièrement les jeunes générations.
Nous verrons si ces sujets gagnent en visibilité dans le Top Influenceurs RSE 2026… et si les femmes sont davantage représentées : seules Salomé Saqué et Estelle Brachlianoff sont présentes dans le Top 10 cette année !
